Créer et aménager un jardin médiéval : guide complet (2024)

Le jardin est par définition un lieu propice à l'imaginaire et à la créativité.

Pourquoi ne pas voyager dans le temps avec votre jardin, en replongeant directement dans le Moyen-Age ? Avec le jardin médiéval, redécouvrez les "simples", ces plantes médicinales avec lesquelles se soignaient les moines. Apprenez ce qu'est un plesssis de noisetier. Aventurez-vous dans la collection de plantes ancestrales devenues rares et précieuses.

Le jardin médiéval est à la fois féérique par les récits qu'il nous rappelle, écologique bien avant l'heure, et soucieux de l'histoire des plantes autochtones et traditionnelles.

Idéal pour les grandes maisons de campagne en vieilles pierres, le jardin médiéval fait partie de notre patrimoine...

Définition du jardin médiéval

Le jardin médiéval est un hortus conclusus, c’est-à-dire un jardin clos, secret calme, idéal pour méditer et chuchoter des secrets. Il est préservé au vu et au su par des murets et des haies.

Le jardin médiéval est un jardin de cloître ou d’abbaye, voire de cimetière (on retrouvait des arbres et des vignes palissées le long des murs de cimetières au Moyen-Age). Il faut dire qu’à l’époque les particuliers n’avaient pas réellement de jardin, et les seigneurs non plus, du moins pas selon la définition qu’on en a aujourd’hui.

Ces jardins faisaient donc partie de la vie quotidienne des moines ou religieuses.

Il faut imaginer un jardin autarcique, directement inspiré du jardin d’Eden, qui devait donc se suffire à lui-même. 

On y trouve : 

  • de quoi se nourrir
  • de quoi se soigner
  • et de quoi faire acte de dévotion, avec des plantes sacrées.

Le jardin médiéval est inspiré de l’architecture des églises et lieux religieux : un grand rectangle, divisé en petites parcelles séparées. Tout y est assez géométrique : rectangles, carrés ou ronds.

Mais surtout, tout y est modeste (en opposition aux autres jardins qui se développent en époque, comme les jardins andalous tout en luxuriance et démonstration). Les plantations sont légèrement surélevées et la terre est retenue par des bordures en noisetier tressé  (des plessis) et les murs sont en pierre sèche.

Au Moyen Âge, l’agriculture est encore toute jeune (elle n’a que 1000 ans), tandis que la botanique est balbutiante. On connaît les herbes, bien sûr, mais davantage de manière empirique et superstitieuse que scientifique.

Le jardin médiéval ne manque cependant pas de charme, même pour un regard de l’époque, mais il doit rester humble et organisé.

Les éléments du jardin médiéval

Le jardin médiéval est composé en plusieurs espaces, tous bien délimités :

  • Le potager, ou hortus
  • Le verger, ou viridarium, planté en forme de crucifix et qui accueille également le cimetière
  • Le coin des herbes à potée (dans l’Europe médiévale, on aime les goûts puissants).
  • Le coin des herbes médicinales ou magiques (liturgiques), ou herbularius. On l’appelle aussi "carré des simples"
  • Le jardin de Marie, avec banquettes engazonnées pour se recueillir avec sec bosquets de fleurs.

Le carré des simples

Le carré des simples, ou herbularius, est le jardin médiéval de plantes qui soignent les maux du corps et de l’âme.

N’oublions pas qu’à l’époque, les plantes étaient la seule médecine connue, et les moines les médecins de village faute de mieux.

On appelait « simples » (simplicis herba) les plantes utilisées pour leurs vertus médicinales, par opposition aux potions complexes que proposait la médecine savante de l’époque.

Le souci est utilisé comme cicatrisant, le thym, le houblon, la valériane ou la camomille comme sédatifs, d’innombrables plantes pour les fièvres, de la menthe, de l’angélique ou de la chicorée pour les troubles digestifs, de la mélisse et de l’armoise pour les troubles féminins, de la mauve pour les troubles respiratoires, etc.

Le jardin de Marie

L’espace le plus fleuri du jardin médiéval est dédié à la religion et aux plantes utilisées en liturgie. Il est dédié à la méditation et à la prière, avec une dimension sacralisée.

Vous y trouverez des rameaux, des herbes de la Saint-Jea( [armoise, lierre, plantain, verveine, millepertuis, fougère et sureau), des chrysanthèmes, des roses rouges évocatrices du sang du Christ, des bleuets en honneur du manteau bleu de Marie…

La basse-cour

Poules, coqs, canards, dindons, oies et cailles occupent la basse-cour. Ils se promènent librement dans le jardin emmuré.

On y trouve souvent un puits au centre, pour une raison pratique. Ce puits symbolise également la résurrection et il est entouré de buis, de plantes saintes et de crucifix.

Les allées sont droites, sobres, pratiques. Selon les régions elles sont faites de gazon, de pierres, de sable, ou de coquillages concassés, pour pouvoir les parcourir sans marcher dans la boue.

Les murs et plessis de noisetier sont omniprésents, comme éléments architecturaux.

Le jardin médiéval : où et pour qui ?

L’avantage du jardin médiéval est qu’il s’agit d’un genre historique, pas géographique : vous pouvez le réaliser dans n’importe quelle région de France (à l’exception des DOM-TOM, où il serait quelque peu anachronique).

Idéalement vous aurez besoin d’un terrain avec une enceinte. Mais si la perspective d’emmurer votre jardin ne vous plaît pas, vous pouvez tout à fait réaliser un simple muret de pierres sèches, à 50 cm de hauteur ! l’effet sera tout aussi convainquant.

Vous aurez besoin d’un terrain ensoleillé, car les plantes de jardin médiéval se plaisent avec une belle exposition au soleil.

Dans la meilleure configuration possible, vous aurez une maison ancienne, en pierre, dans un village historique. On pense tout de suite aux Cévennes, au Morvan, à la Bourgogne ou à la Bretagne pour les jardins médiévaux : les grosses bâtisses en pierre fortifiées inspirent sans doute davantage.

Évidemment rien n’interdit de réaliser un jardin médiéval si vous avez une maison d’architecture contemporaine, mais en ce cas il faudrait ne pas avoir de vis-à-vis entre les 2, et un jardin clos permet précisément de cacher cette dualité de styles et d’époques !

Avantages et inconvénients du jardin médiéval

  • Que des plantes utiles, pour manger et se soigner
  • Un jardin autarcique
  • Organisé et structuré
  • Respectueux de l'environnement
  • Collection de plantes autochtones rares
  • Présence de plantes toxiques
  • Plus pratique qu’ornemental
  • À l’intérieur d'une enceinte
  • Risque d'anachronisme avec des espèces exotiques

Liste plantes du jardin médiéval

Au Moyen Âge, bien entendu, on n’avait pas le choix botanique que nous avons aujourd’hui, avec des milliers d’espèces, dont nombre sont exotiques, à planter au jardin.

On composait donc le jardin médiéval avec des plantes rustiques et autochtones, et des plantes utiles ramenées par les Croisés de leurs aventures lointaines.

Là encore, à l’époque on composait avec le climat local, il n’y avait pas de serres et de méthodes d’hivernage : les espèces plantées devaient s’adapter au climat. Les jardins médiévaux du sud étaient plus riches en fruits, ceux du nord plus riches en légumes racines et légumes feuilles.

De nos jours, si vous voulez réaliser un jardin médiéval vous pouvez rester fidèle à l’époque, ou l’enrichir de nouvelles espèces.

Côté verger

Amandier
Cerisier
Châtaignier
Cognassier
Figuier
Laurier
Mûrier
Noisetier

Noyer
Pêcher
Pin
Poirier
Pommier
Prunier
Sorbier
Vigne

Côté potager

Ail
Amarante sauvage
Aneth
Anis vert
Arroche
Artichaut
Bettes
Cardon
Carotte
Céleri
Cerfeuil
Chicorée

Choux
Ciboulette
Citronnelle

Coloquinte
Coriandre
Cresson de fontaine
Cucurbitacées
Cumin
Échalote
Épinard
Estragon
Fenouil

Fenugrec
Fèves
Genévrier
Laitue
Lentilles
Livèche

Marjolaine
Moutarde
Navet
Panais

Persil
Poireau
Pois
Radis
Raifort
Romarin
Roquette
Sarriette
Sauge
Scille maritime

Dans le carré des simples (plantes médicinales)

Certaines plantes utilisées au Moyen Âge le sont toujours, après des siècles à tester leur utilité phytothérapeutique. Parmi elles certaines ont prouvé leur utilité, tandis que d’autres plantes magiques sont depuis tombé aux oubliettes, faute d’effet médical avéré. Et surtout : les médicaments les ont remplacées.

À noter que certaines de ces plantes étaient toxiques, voire mortelles. Elles pouvaient être utilisées comme poison pour la vermine ou à des fins magiques.


Faites preuve de la plus grande des prudences, en particulier si vous avez des enfants ou animaux domestiques. Elles peuvent être mortelles pour eux.

Les accessoires du jardin médiéval

  • Le jardin médiéval est par définition clos : c’est un espace rare, riche en ressources au potager, et donc protégé. Contre toute forme d’envahisseurs : les nuisibles, la faune, les voleurs et les barbares. Il faut donc l’emmurer (même si c’est un muret) et lui créer un portail.
  • On y trouve souvent un puits au centre, pour une raison pratique. Ce puits symbolise également la résurrection et est entouré de buis, de plantes saintes et de crucifix. Si vous avez la chance d’avoir un puits sur votre terrain, il sera parfait paré de pierres de la région, et de forme hexagonale.
  •  Les allées sont droites, sobres, pratiques. Selon les régions elles sont faites de gazon, de pierres, de sable, ou de coquillages concassés, pour pouvoir les parcourir sans marcher dans la boue.
  • Les plessis de noisetier sont omniprésents, comme éléments architecturaux.
  • Plus rarement, on trouve quelques bancs de pierre engazonnés pour s’asseoir. Peu d’éléments d’ornement ou de mobilier dans le jardin médiéval véritable.
  • Cependant, dans le jardin médiéval revu au goût du jour pourquoi ne pas installer de bancs en pierre, fontaines, tonnelles en fer forgé ou berceau de verdure.
  • Le berceau de verdure est un élément mobilie architecturé dont le but est de procurer ombre et fraîcheur, et un petit endroit pour se reposer.
    Vous pouvez construire une de ces tonnelles/pergolas en branches ou plessis de noisetier ou d’osier et y attacher de la vigne, des rosiers, de la glycine, du houblon…
    Vous pouvez également utiliser cette technique çà et là le long des allées de votre jardin : cet art était très répandu dans les campagnes du Moyen Âge.

Inspirez-vous : quelques jardins médiévaux célèbres

Rien de mieux pour trouver l’inspiration que de se rendre dur place et visiter quelques fameux représentants du genre.


Livrez-vous sans hésiter à un reportage photo de jardin médiéval dans les sublimes endroits suivants :

Le plan du jardin de l’abbaye de Saint-Gall

Datant d'environ 900 ap. JC, ce plan était destiné à l’abbé de Saint-Gall pour créer le jardin de l’abbaye qui fut construire en 930 apr. J.-C.. Le manuscrit de Saint-Gall est le plus grand manuscrit connu de son époque. Il a d’ailleurs été repris par quasiment l’unanimité des abbayes d’Europe de l’époque.

Comment faire un jardin médiéval étape par étape ?

  1. Choisissez un emplacement au soleil, car la majorité des simples poussent en plein soleil.
  2. Tracez les emplacements : le rectangle principal et les différents carrés ou rectangles à l’intérieur.
  3. Tracez les allées.
  4. Déterminez l’entrée du jardin, avec son portail d’accès.
  5. Réalisez le terrassement des bandes surélevées.
  6. Réalisez le mur d’enceinte, en prévoyant des bancs en pierre (gazonnés ou non).
  7. Installez les plessis en bordure des bande potagères et éventuellement en arcades au-dessus des allées, ou en berceau de verdure.
  8. Faites la liste des cultures que vous planterez, par espaces. Vous devrez parfois vous adresser à des groupes spécialisés, des jardins botaniques ou des collectionneurs, ou encore vous rendre à des événements pour trouver des plants devenus rare (le processus peut prendre des années). Pour les plantes médicinales, consultez des sites d’herboristerie, vous y trouverez de précieux conseils sur les plantes à utiliser selon vos symptômes.
  9. Vérifiez les dates et conditions de plantation.
  10. Aérez et griffez la terre, amendez au besoin.
  11. Plantez, semez, arrosez.
  12. Installez-les grimpants sur le berceau de verdure.
  13. Bannissez tout traitement chimique : le jardin médiéval est 100 % écologique et sans ajout de produit chimique. Qui plus est certaines adventices dont on a depuis boudé les vertus étaient utilisées à l’époque : on ne désherbait pas, on récoltait.

Prix de la réalisation d’un jardin médiéval

Il n’est pas vraiment besoin de faire intervenir un architecte paysagiste pour créer votre propre jardin médiéval. Toutefois si vous préférez vous adjoindre les services d’un architecte paysagiste qui vous expliquera en détails comment réaliser un jardin médiéval tout en respectant l’histoire de votre région et ne pas faire d’impair, il vous en coûtera en moyenne de 350 à 700 € le m2 pour avoir des plans.

Pour créer votre jardin médiéval vous-même, inspirez-vous des célèbres jardins médiévaux et du plan de Saint-Gall et trouvez une parcelle rectangulaire à subdiviser : le tout est (presque) joué.

Vos deux plus grandes difficultés seront :

  1. de trouver certaines espèces de légumes anciens et de plantes aujourd’hui quasiment disparues, soit parce que tombées en désuétude, soit parce que toxiques
  2. et de trouver des branches d’osier ou de noisetier ou à défaut un artisan capable de les tresser pour vous.

Troisième difficulté éventuelle : si vous voulez rester fidèle à la tradition et emmurer le jardin. Il vous faudra faire appel à un maçon spécialisé dans les constructions en pierre sèche. Ce savoir-faire est réservé de nos jours aux tailleurs de pierre ou à de rares artisans type Compagnons du Devoir. Leur tarif horaire est sensiblement plus élevé que celui des maçons classiques : aux environs de 65 € de l’heure.

Vous aurez sans doute à prévoir un peu de terrassement pour la réalisation des bandes potagères surélevées et des allées. Une entreprise de terrassement vous facturera environ 400 € pour ce type de terrassement léger (sauf si votre terrain présente des difficultés).

On trouve des carrés potagers de noisetier tressé à environ 80 € les 4 mètres linéaires dans les grandes surfaces de jardinerie. Consultez toutefois des vanniers si vous avez dans votre région. Vous obtiendrez peut-être des prix intéressants (et sans doute un plessis de bien meilleure qualité).

Ce à quoi vous devrez ajouter les plantations, les matériaux…